Soins sous hypnose. Moins de médicaments et donc mois d’effets secondaires : tels sont les intérêts de l’hypnose selon le spécialiste de l’hôpital Saint-Charles
On ne peut pas dire qu’elle soit monnaie courante, mais elle émerge. Bien implantée aux États-Unis ou encore en Belgique, l’hypnose médicale (ou « communication hypnotique » en langage professionnel) tente de se frayer un chemin dans le milieu hospitalier français. Une « percée » qui touche, depuis peu, le centre hospitalier toulois : à Saint-Charles, sous l’impulsion du médecin anesthésiste Fabrice Kuntz, le personnel - tous services confondus - est sensibilisé à cette pratique. Explications.
Les principes
« Sous hypnose, on ne dort pas ! C’est un état de conscience modifié, le patient sait parfaitement ce qui se passe autour de lui », prévient d’emblée le Dr Kuntz, formé à Strasbourg, sous la houlette du Dr Patrick Bellet, reconnu par l’Université. Concrètement, le travail de l’anesthésiste consiste à parler de façon positive au patient, pour lui faire imaginer un scénario agréable, à se représenter une situation plaisante. Ce qui engendre une baisse de la tension et un ralentissement du rythme cardiaque. « Lorsque le patient est installé, il faut chercher à stimuler ses sens, à travers une histoire bienveillante ; les loisirs sont souvent un bon point d’accroche. Par exemple, je lui suggère de penser à une balade sur la plage ou en forêt, en se représentant les sons, les odeurs, le paysage… »
Lors de la consultation pré-anesthésique, le médecin propose l’utilisation de l’hypnose, et, en cas d’accord, prend rapidement connaissance du patient (son métier, ses passions, ses loisirs…) pour adapter le scénario à lui suggérer le moment venu.
« Quand le timing le permet, je lui demande parfois de s’entraîner un peu avant, à la maison. »
Bref, il n’est question que de plaisir et de sérénité, à l’opposé du tristement fameux « attention, serrez les dents, ça va faire mal », parfois entendu avant une piqûre !
Les applications
Attention : l’hypnose n’intervient qu’en complément d’une anesthésie loco-régionale. Au bloc, pour certaines interventions invasives, comme la pose d’une chambre implantable (NDLR : réservoir avec accès vasculaire implanté sous la peau, pour l’injection de médicaments) ou une endoscopie, une réduction de fracture, ou encore la prise en charge de la douleur des personnes en fin de vie, voire lors de l’accouchement. Les champs d’utilisation de l’hypnose sont variés. Et, évidemment, pas question ici d’opération lourde.
« La douleur physique, aiguë ou chronique peut être gérée, mais pas seulement », ajoute Fabrice Kuntz. « Cela fonctionne bien également avec les pratiques addictives, comme les troubles alimentaires, le tabac ou l’alcool, la prévention du burn-out ou la gestion des angoisses. »
L’intérêt
« Avec l’hypnose, on peut réduire jusqu’à 3 % l’utilisation de substances médicamenteuses », précise le praticien. « Et donc, qui dit moins de produits chimiques, dit moins d’effets secondaires et une meilleure récupération. Et même une meilleure cicatrisation après certaines interventions. »
En outre, cette pratique renforce la relation patient - praticien. « La confiance compte beaucoup. »
La formation
« Ce projet lié à l’hypnose, de longue date, a pu se concrétiser récemment en étant soutenu par l’institution », résume Marie-José Fringant, coordinatrice des soins à Saint-Charles.
« La démarche est transversale ; tous les services sont sensibilisés, des chirurgiens aux sages-femmes, en passant par les infirmiers ou le personnel administratif, sur la base du volontariat. Si un tiers des personnels sensibilisés applique ce qu’ils ont appris, ce sera déjà un progrès », ajoute la cadre, qui a vu une première vague de professionnels être formés en interne.
« Nous sommes certains que c’est une plus-value pour le patient, et pour l’établissement. »
La psychologue sera elle aussi formée à l’hypnothérapie à la rentrée. Et une douzaine de personnes bénéficieront prochainement d’une formation plus poussée sur trois jours, par un spécialiste nancéien.
Par ailleurs, les responsables de Saint-Charles travaillent à l’élaboration d’une charte de bonne conduite en cas de pratique de l’hypnose. « Il faut respecter une certaine éthique : pas question de manipulation mentale, ni de spiritualité. »
Stéphanie CHEFFER
Les principes
« Sous hypnose, on ne dort pas ! C’est un état de conscience modifié, le patient sait parfaitement ce qui se passe autour de lui », prévient d’emblée le Dr Kuntz, formé à Strasbourg, sous la houlette du Dr Patrick Bellet, reconnu par l’Université. Concrètement, le travail de l’anesthésiste consiste à parler de façon positive au patient, pour lui faire imaginer un scénario agréable, à se représenter une situation plaisante. Ce qui engendre une baisse de la tension et un ralentissement du rythme cardiaque. « Lorsque le patient est installé, il faut chercher à stimuler ses sens, à travers une histoire bienveillante ; les loisirs sont souvent un bon point d’accroche. Par exemple, je lui suggère de penser à une balade sur la plage ou en forêt, en se représentant les sons, les odeurs, le paysage… »
Lors de la consultation pré-anesthésique, le médecin propose l’utilisation de l’hypnose, et, en cas d’accord, prend rapidement connaissance du patient (son métier, ses passions, ses loisirs…) pour adapter le scénario à lui suggérer le moment venu.
« Quand le timing le permet, je lui demande parfois de s’entraîner un peu avant, à la maison. »
Bref, il n’est question que de plaisir et de sérénité, à l’opposé du tristement fameux « attention, serrez les dents, ça va faire mal », parfois entendu avant une piqûre !
Les applications
Attention : l’hypnose n’intervient qu’en complément d’une anesthésie loco-régionale. Au bloc, pour certaines interventions invasives, comme la pose d’une chambre implantable (NDLR : réservoir avec accès vasculaire implanté sous la peau, pour l’injection de médicaments) ou une endoscopie, une réduction de fracture, ou encore la prise en charge de la douleur des personnes en fin de vie, voire lors de l’accouchement. Les champs d’utilisation de l’hypnose sont variés. Et, évidemment, pas question ici d’opération lourde.
« La douleur physique, aiguë ou chronique peut être gérée, mais pas seulement », ajoute Fabrice Kuntz. « Cela fonctionne bien également avec les pratiques addictives, comme les troubles alimentaires, le tabac ou l’alcool, la prévention du burn-out ou la gestion des angoisses. »
L’intérêt
« Avec l’hypnose, on peut réduire jusqu’à 3 % l’utilisation de substances médicamenteuses », précise le praticien. « Et donc, qui dit moins de produits chimiques, dit moins d’effets secondaires et une meilleure récupération. Et même une meilleure cicatrisation après certaines interventions. »
En outre, cette pratique renforce la relation patient - praticien. « La confiance compte beaucoup. »
La formation
« Ce projet lié à l’hypnose, de longue date, a pu se concrétiser récemment en étant soutenu par l’institution », résume Marie-José Fringant, coordinatrice des soins à Saint-Charles.
« La démarche est transversale ; tous les services sont sensibilisés, des chirurgiens aux sages-femmes, en passant par les infirmiers ou le personnel administratif, sur la base du volontariat. Si un tiers des personnels sensibilisés applique ce qu’ils ont appris, ce sera déjà un progrès », ajoute la cadre, qui a vu une première vague de professionnels être formés en interne.
« Nous sommes certains que c’est une plus-value pour le patient, et pour l’établissement. »
La psychologue sera elle aussi formée à l’hypnothérapie à la rentrée. Et une douzaine de personnes bénéficieront prochainement d’une formation plus poussée sur trois jours, par un spécialiste nancéien.
Par ailleurs, les responsables de Saint-Charles travaillent à l’élaboration d’une charte de bonne conduite en cas de pratique de l’hypnose. « Il faut respecter une certaine éthique : pas question de manipulation mentale, ni de spiritualité. »
Stéphanie CHEFFER
Attentat de Nice : «On ne peut pas vivre en état de stress permanent»....
Décryptage avec Evelyne Josse, psychotraumatologue, pour Le Parisien
Selon la psychologue, maître de conférences à l'université de Lorraine à Metz, le traumatisme nous touche tant sur le plan individuel que sur le plan collectif.
Quelles conséquences psychologiques l'attentat de Nice va-t-il avoir sur les victimes et les témoins ?
Evelyne JOSSE. Voir des corps voler comme dans un jeu de quilles et des membres éparpillés sur le sol constitue un choc encore plus violent que de tomber sur une victime couchée au sol avec du sang qui sort de la poitrine. Mais suivant sa personnalité, ses antécédents, son degré d'implication dans le drame et le niveau de soutien fourni par son entourage, chacun réagira de manière très différente. Certains manifestent bruyamment leurs émotions par des pleurs ou des cris, d'autres semblent totalement indifférents ou bien se sentent coupables d'avoir survécu. Mais ça ne présage en rien de leur évolution mentale. On peut très bien avoir eu le sang-froid de secourir quelqu'un le jour J et développer un syndrome post-traumatique après.
Comment déceler un syndrome de stress post-traumatique ?
Les premiers symptômes sont les reviviscences : les flash-back ou les cauchemars de répétition. Mais un état de stress post-traumatique peut aussi se caractériser par des attitudes d'évitement de tout ce qui nous fait repenser au drame : les lieux, les situations mais aussi les conversations. Autre signe, une hypervigilance. On est perpétuellement en alerte, on sursaute au moindre bruit... Je l'ai constaté chez l'une de mes patientes qui a vécu l'attentat dans le métro de Bruxelles. Pendant plusieurs semaines, elle n'osait plus descendre dans sa cave.
Peut-on s'en remettre ?
Oui, heureusement ! Certaines victimes voient leurs troubles s'estomper et disparaître spontanément. Mais, dans la plupart des cas, la reconstruction demande du temps et nécessite une vraie prise en charge psychologique. Les méthodes qui donnent le plus de résultats sont l'hypnose et l'EMDR. Une technique importée des Etats-Unis qui consiste à faire effectuer une série de mouvements oculaires au patient pour « reprogrammer » son mental après le traumatisme. En revanche, il faut se méfier des benzodiazépines, qui bloquent le processus de guérison naturelle et provoquent une dépendance sur le long terme.
Au-delà des souffrances individuelles, peut-on parler d'un traumatisme collectif ?
Sans aucun doute. En choisissant la date du 14 Juillet d'abord, le tueur a frappé au coeur les valeurs de la société française. Comme un mari qui jette son alliance à l'égout après une dispute conjugale tue symboliquement le mariage. Et puis il s'est attaqué à des familles, à des enfants. Il ne les visait pas spécifiquement, mais, en n'épargnant pas les plus vulnérables, il a voulu montrer que rien ne pourrait arrêter les terroristes, que tout le monde désormais était une cible potentielle.
Comment le surmonter ?
La vague d'attentats n'est sans doute pas près de s'arrêter. Or on ne peut pas vivre en situation de stress permanent. Ce n'est pas tenable sur le long terme. Au gré des attaques, on va donc sans doute se montrer de plus en plus vigilants, éviter au maximum les lieux publics mais développer en même temps des mécanismes d'adaptation. Pour essayer de mener le plus possible une vie normale.
Selon la psychologue, maître de conférences à l'université de Lorraine à Metz, le traumatisme nous touche tant sur le plan individuel que sur le plan collectif.
Quelles conséquences psychologiques l'attentat de Nice va-t-il avoir sur les victimes et les témoins ?
Evelyne JOSSE. Voir des corps voler comme dans un jeu de quilles et des membres éparpillés sur le sol constitue un choc encore plus violent que de tomber sur une victime couchée au sol avec du sang qui sort de la poitrine. Mais suivant sa personnalité, ses antécédents, son degré d'implication dans le drame et le niveau de soutien fourni par son entourage, chacun réagira de manière très différente. Certains manifestent bruyamment leurs émotions par des pleurs ou des cris, d'autres semblent totalement indifférents ou bien se sentent coupables d'avoir survécu. Mais ça ne présage en rien de leur évolution mentale. On peut très bien avoir eu le sang-froid de secourir quelqu'un le jour J et développer un syndrome post-traumatique après.
Comment déceler un syndrome de stress post-traumatique ?
Les premiers symptômes sont les reviviscences : les flash-back ou les cauchemars de répétition. Mais un état de stress post-traumatique peut aussi se caractériser par des attitudes d'évitement de tout ce qui nous fait repenser au drame : les lieux, les situations mais aussi les conversations. Autre signe, une hypervigilance. On est perpétuellement en alerte, on sursaute au moindre bruit... Je l'ai constaté chez l'une de mes patientes qui a vécu l'attentat dans le métro de Bruxelles. Pendant plusieurs semaines, elle n'osait plus descendre dans sa cave.
Peut-on s'en remettre ?
Oui, heureusement ! Certaines victimes voient leurs troubles s'estomper et disparaître spontanément. Mais, dans la plupart des cas, la reconstruction demande du temps et nécessite une vraie prise en charge psychologique. Les méthodes qui donnent le plus de résultats sont l'hypnose et l'EMDR. Une technique importée des Etats-Unis qui consiste à faire effectuer une série de mouvements oculaires au patient pour « reprogrammer » son mental après le traumatisme. En revanche, il faut se méfier des benzodiazépines, qui bloquent le processus de guérison naturelle et provoquent une dépendance sur le long terme.
Au-delà des souffrances individuelles, peut-on parler d'un traumatisme collectif ?
Sans aucun doute. En choisissant la date du 14 Juillet d'abord, le tueur a frappé au coeur les valeurs de la société française. Comme un mari qui jette son alliance à l'égout après une dispute conjugale tue symboliquement le mariage. Et puis il s'est attaqué à des familles, à des enfants. Il ne les visait pas spécifiquement, mais, en n'épargnant pas les plus vulnérables, il a voulu montrer que rien ne pourrait arrêter les terroristes, que tout le monde désormais était une cible potentielle.
Comment le surmonter ?
La vague d'attentats n'est sans doute pas près de s'arrêter. Or on ne peut pas vivre en situation de stress permanent. Ce n'est pas tenable sur le long terme. Au gré des attaques, on va donc sans doute se montrer de plus en plus vigilants, éviter au maximum les lieux publics mais développer en même temps des mécanismes d'adaptation. Pour essayer de mener le plus possible une vie normale.
NDLR concernant l'EMDR
Aujourd'hui, et grâce aux travaux de nos confrères et amis Laurent Gross et Dr Philippe Aïm, nous ne faisons plus la différence entre une thérapie en hypnose et en EMDR - IMO, qui sont un seul et même outil thérapeutique.
Hypnose : gare aux arnaques - La Nouvelle République
Stéphane Rouet est infirmier. Il a aussi installé son cabinet à Saint-Maur pour pratiquer l’hypnose. Il regrette que cette pratique manque de cadre législatif.
L'hypnose, tout le monde connaît. Pourtant, beaucoup d'entre nous s'en font une image erronée. Par exemple, dans le cabinet de Stéphane Rouet installé depuis le 1er avril à Saint-Maur, on ne trouvera pas de patient endormi sur une chaise longue, ou subjugué par le va-et-vient d'un pendule. Trois fauteuils et une petite table garnissent la pièce. On s'assoit face-à-face et une discussion s'engage.
« Je fais de l'hypnose, et des thérapies brèves, explique-t-il. Ce sont des outils qui s'ajoutent au parcours du patient. L'intérêt est d'individualiser le soin, pour le bien-être du patient. L'essentiel est qu'il se sente mieux. »
" N'importe qui peut s'installer "
Stéphane Rouet est infirmier libéral. Il a travaillé au Centre psychothérapique de Gireugne et au centre hospitalier de Châteauroux, où il a participé à la création du service urgences psychiatriques. Intéressé par l'hypnose, une pratique qui, petit à petit, se fait une place dans le milieu médical, il a creusé le sujet, jusqu'à trouver une formation diplômante : un DU (diplôme universitaire) hypnose et thérapies brèves stratégiques et solutionnistes à la Faculté de médecine de Limoges. Il s'inscrit et y est accepté « Une centaine de personnes postulent et vingt élèves sont pris tous les deux ans. Cinq ou six facultés proposent ce genre de formations. Dans ma promotion, il y avait des médecins et une grande majorité de psychiatres. »
Une pratique bien encadrée, donc, qui intéresse le corps médical. Mais Stéphane Rouet regrette l'absence de cadre législatif. « Il y a en France un engouement pour les thérapies complémentaires telles que l'hypnose. Mais, certaines personnes profitent du manque de cadre législatif relatif à l'installation pour se déclarer professionnelles sans formation diplômante sérieuse, ni expérience de soins. Cela porte préjudice à la pratique des professionnels de soins formés et à l'hypnose en général. » Une note du service central du renseignement territorial, datant de février 2016, pointe du doigt ces pratiques. « Le département de l'Indre ne fait pas exception. N'importe qui peut s'installer, c'est le flou artistique. On voudrait que l'État légifère. »
Alors, que faire pour ne pas tomber dans le piège ? « Savoir où les gens ont été formés. Il n'y a que cette solution. » Le diplôme de Stéphane Rouet, lui, trône sur une table, dans le cabinet, en face du patient.
repères
Douleurs aiguës ou chroniques, troubles phobiques, troubles de l'addiction… Toutes sortes de maux peuvent être apaisées grâce à l'hypnose. Mais il ne faut pas s'attendre à une solution miracle. Les choses se font étape par étape. Une séance peut parfois suffire. En moyenne, trois à quatre séances sont programmées. Maximum : six à huit.
« Je commence d'abord par démystifier la pratique. Puis, je prends le temps d'écouter le patient. En parlant, il me donne lui-même la solution. Puis, un contrat est passé. Une sorte de rapport moral. On appelle ça l'alliance thérapeutique. J'explique toujours ce qui va se passer. Si cela ne convient pas au patient, on peut en rester là et se quitter. »
L'hypnose n'est pas une pratique difficile. Stéphane Rouet l'apprend même à ses patients. « L'hypnose n'existe pas en tant que telle. Il s'agit plutôt d'auto-hypnose. L'intérêt est de leur donner des techniques pour qu'ils puissent les reproduire chez eux. Souvent, les gens sont figés par leur problème. Le but est de défiger, sortir du problème en ayant un regard différent. »
Mais que fait l'hypnose au juste ? « Cela permet de potentialiser certaines ressources du cerveau, explique Stéphane Rouet. On travaille avec les souvenirs. Mais il y a des choses à ne pas faire. On peut facilement déstructurer un souvenir. C'est pour ça qu'il faut faire attention. »
Néanmoins, « on ne peut pas hypnotiser quelqu'un contre son gré. La conscience critique est toujours présente ».
Élodie Corvée
L'hypnose, tout le monde connaît. Pourtant, beaucoup d'entre nous s'en font une image erronée. Par exemple, dans le cabinet de Stéphane Rouet installé depuis le 1er avril à Saint-Maur, on ne trouvera pas de patient endormi sur une chaise longue, ou subjugué par le va-et-vient d'un pendule. Trois fauteuils et une petite table garnissent la pièce. On s'assoit face-à-face et une discussion s'engage.
« Je fais de l'hypnose, et des thérapies brèves, explique-t-il. Ce sont des outils qui s'ajoutent au parcours du patient. L'intérêt est d'individualiser le soin, pour le bien-être du patient. L'essentiel est qu'il se sente mieux. »
" N'importe qui peut s'installer "
Stéphane Rouet est infirmier libéral. Il a travaillé au Centre psychothérapique de Gireugne et au centre hospitalier de Châteauroux, où il a participé à la création du service urgences psychiatriques. Intéressé par l'hypnose, une pratique qui, petit à petit, se fait une place dans le milieu médical, il a creusé le sujet, jusqu'à trouver une formation diplômante : un DU (diplôme universitaire) hypnose et thérapies brèves stratégiques et solutionnistes à la Faculté de médecine de Limoges. Il s'inscrit et y est accepté « Une centaine de personnes postulent et vingt élèves sont pris tous les deux ans. Cinq ou six facultés proposent ce genre de formations. Dans ma promotion, il y avait des médecins et une grande majorité de psychiatres. »
Une pratique bien encadrée, donc, qui intéresse le corps médical. Mais Stéphane Rouet regrette l'absence de cadre législatif. « Il y a en France un engouement pour les thérapies complémentaires telles que l'hypnose. Mais, certaines personnes profitent du manque de cadre législatif relatif à l'installation pour se déclarer professionnelles sans formation diplômante sérieuse, ni expérience de soins. Cela porte préjudice à la pratique des professionnels de soins formés et à l'hypnose en général. » Une note du service central du renseignement territorial, datant de février 2016, pointe du doigt ces pratiques. « Le département de l'Indre ne fait pas exception. N'importe qui peut s'installer, c'est le flou artistique. On voudrait que l'État légifère. »
Alors, que faire pour ne pas tomber dans le piège ? « Savoir où les gens ont été formés. Il n'y a que cette solution. » Le diplôme de Stéphane Rouet, lui, trône sur une table, dans le cabinet, en face du patient.
repères
Douleurs aiguës ou chroniques, troubles phobiques, troubles de l'addiction… Toutes sortes de maux peuvent être apaisées grâce à l'hypnose. Mais il ne faut pas s'attendre à une solution miracle. Les choses se font étape par étape. Une séance peut parfois suffire. En moyenne, trois à quatre séances sont programmées. Maximum : six à huit.
« Je commence d'abord par démystifier la pratique. Puis, je prends le temps d'écouter le patient. En parlant, il me donne lui-même la solution. Puis, un contrat est passé. Une sorte de rapport moral. On appelle ça l'alliance thérapeutique. J'explique toujours ce qui va se passer. Si cela ne convient pas au patient, on peut en rester là et se quitter. »
L'hypnose n'est pas une pratique difficile. Stéphane Rouet l'apprend même à ses patients. « L'hypnose n'existe pas en tant que telle. Il s'agit plutôt d'auto-hypnose. L'intérêt est de leur donner des techniques pour qu'ils puissent les reproduire chez eux. Souvent, les gens sont figés par leur problème. Le but est de défiger, sortir du problème en ayant un regard différent. »
Mais que fait l'hypnose au juste ? « Cela permet de potentialiser certaines ressources du cerveau, explique Stéphane Rouet. On travaille avec les souvenirs. Mais il y a des choses à ne pas faire. On peut facilement déstructurer un souvenir. C'est pour ça qu'il faut faire attention. »
Néanmoins, « on ne peut pas hypnotiser quelqu'un contre son gré. La conscience critique est toujours présente ».
Élodie Corvée